Mal de dos, un véritable fardeau pour notre siècle
Longtemps reléguée au rang des douleurs ordinaires, la lombalgie s’impose aujourd’hui comme un enjeu majeur de santé publique. Touchant 8 Français·es sur 10 au cours de leur vie, le mal de dos est devenu la première cause d’invalidité avant 45 ans. Si le sujet émerge timidement dans les politiques de prévention, il reste encore perçu comme bénin, passager ou auto-gérable. Dans les faits, le mal de dos chronique agit comme un véritable handicap invisible, avec des conséquences lourdes sur le quotidien.
Le mal de dos désigne un ensemble de douleurs localisées au niveau de la colonne vertébrale – lombaires, dorsales ou cervicales – sans nécessairement présenter de lésions visibles à l’imagerie médicale. Dans la majorité des cas, il s’agit de douleurs dites « communes », c’est-à-dire non spécifiques. Ces douleurs peuvent être aiguës ou chroniques, ponctuelles ou permanentes, mais elles n’en restent pas moins incapacitantes.
Chez une personne en situation de handicap lié au dos, ces douleurs se traduisent par une fatigue persistante, une gêne à la marche, des difficultés à rester assis·e ou debout longtemps, un sommeil perturbé et une réduction progressive des activités. La douleur, souvent fluctuante, empêche d’anticiper, de planifier, de se projeter. Cela affecte autant la vie professionnelle que personnelle.
La lombalgie représente la première cause d’arrêt maladie en France. Selon l’Assurance Maladie, elle est responsable de plus de 12,2 millions de journées de travail perdues chaque année, soit l’équivalent de plus de 57 000 postes à temps plein. Le coût économique est estimé à plusieurs milliards d’euros. Mais malgré ces chiffres, le mal de dos reste rarement reconnu comme un motif de reconnaissance du handicap ou d’aménagement spécifique.
Des douleurs de dos souvent minimisées
Parler de son mal de dos reste difficile. Dans l’imaginaire collectif, cette douleur est souvent minimisée : « tout le monde a mal au dos », « c’est le stress », « il faut bouger ». Ces phrases banalisent la souffrance réelle vécue par les personnes concernées. Une personne en situation de douleur chronique finit par douter de sa propre légitimité, se sentant incomprise, voire coupable de ne pas "aller mieux".
Dans les consultations, la prise en charge du mal de dos reste inégale. Certain·es professionnel·les privilégient les anti-inflammatoires ou le repos, sans explorer les causes profondes ni proposer d’approche pluridisciplinaire. Pourtant, les facteurs sont multiples : tensions musculaires, stress, mauvaises postures, traumatismes anciens, fatigue mentale, sédentarité. La douleur devient un symptôme global, qui nécessite une réponse globale.
Sur les réseaux sociaux, des personnes témoignent. Le kinésithérapeute Major Mouvement, suivi par plus de 600 000 abonné·es, sensibilise sur les douleurs dorsales avec pédagogie et humour. D’autres comptes comme @mal_dos_chronique ou @kinécoachpartage montrent les adaptations possibles, les exercices simples ou les stratégies de soulagement. Ces voix permettent à d’autres de se reconnaître, de s’informer, et de sortir du silence.
Prévenir le mal de dos
La Haute Autorité de Santé recommande aujourd’hui l’activité physique comme première option thérapeutique en cas de lombalgie. La natation, la marche, les étirements ou la gymnastique douce permettent de renforcer le dos et de réduire la douleur sur le long terme. Des centres de soins proposent des parcours pluridisciplinaires, associant kinésithérapie, ergothérapie, psychothérapie et éducation thérapeutique du patient.
Mais l’accès à ces soins reste très inégal. Les délais pour obtenir un rendez-vous chez un·e spécialiste dépassent souvent plusieurs mois. Les séances de kiné, pourtant essentielles, ne sont pas toujours prises en charge en totalité. La précarité financière peut ainsi limiter l’accès à une prise en charge durable.
Dans le monde du travail, les aménagements sont encore rares. Un poste debout-assis, une chaise ergonomique, des temps de pause supplémentaires ou la possibilité de télétravailler pourraient pourtant améliorer la qualité de vie des personnes en situation de handicap lié au dos. Mais ces adaptations dépendent encore trop souvent de la bonne volonté de l’employeur.
L’absence de reconnaissance administrative constitue un autre frein. Une douleur chronique au dos, sans diagnostic "structurant", ne donne pas systématiquement accès à la RQTH (Reconnaissance de la Qualité de Travailleur Handicapé). Cela prive les personnes concernées de dispositifs d'accompagnement essentiels, les laissant dans une zone grise entre invalidité médicale et invisibilité sociale.
De Laure ROUSSELET
*Source image: banque d'images libre de droits - CANVA
Pour rappel, Petite Mu est le 1er média qui sensibilise aux handicaps invisibles 💛
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