Un fauteuil roulant ou une canne blanche ne définissent pas toute la sphère du handicap. En 2023, la France comptait 12 millions de personnes en situation de handicap, dont plus de 9 millions vivant avec un handicap invisible. Ces derniers représentent toujours 80% des personnes handicapées, sur le territoire national. Mais alors, comment différencier handicap visible et handicap invisible ? On vous explique.
D’après la loi Handicap promulguée en 2005, le handicap constitue la “ limitation d’activité ou restriction de participation à la vie en société subie dans son environnement par une personne en raison d’une altération substantielle, durable ou définitive d’une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques, d’un polyhandicap ou d’un trouble de santé invalidant.”
L’Organisation Mondiale de la Santé liste en tout 5 catégories de handicap.
Les handicaps visibles comprennent :
- Le handicap sensoriel (handicap visuel et le handicap auditif).
- Le handicap moteur (amputations, atteintes musculaires, atteintes articulaires qui entraînent une réduction plus ou moins importante de la mobilité et de la motricité empêchant la pratique de certaines activités (sportives, manuelles…).
Quand les handicaps invisible comprennent :
- Le handicap mental (maladies génétiques, les anomalies chromosomiques, la trisomie 21, les virus, les parasites contractés durant la grossesse ou encore la prise de tabac ou d’alcool au cours des neuf mois, un virus, un traumatisme crânien, une maladie infectieuse contractée dans la petite enfance peuvent aussi faire partie des causes).
- Le handicap psychique (troubles bipolaires, troubles dépressifs, schizophrénie, paranoïa, névroses obsessionnelles, burn-out…).
- Les maladies invalidantes (maladies respiratoires, auto-immunes, digestives ou infectieuses).
On ajoute à cela trois catégories de handicap invisibles non-répertoriées par l’OMS :
- Les troubles DYS ou troubles cognitifs spécifiques (dyslexie, dyspraxie, dysphasie...)
- Les troubles neurologiques (Les affections neuromusculaires, les maladies d'Alzheimer et de Parkinson, l'accident vasculaire cérébral (AVC), le syndrome de Guillain-Barré, la sclérose en plaques…)
- Les troubles musculosquelettiques (tendinites, lombalgies, syndrome du canal carpien au poignet…)
Mais la ligne entre handicap visible et handicap invisible peut parfois sembler très mince. Tout se joue dans le contexte. Dans certains cas comme celui des handicaps psychiques, la maladie devient rapidement visible en cas de crise. Pareil pour la sclérose en plaque, maladie neurologique et initialement invisible, mais qui, selon le contexte et les symptômes, peut s’apercevoir, notamment pendant une poussée. À l’inverse, on peut ne pas s’apercevoir qu’une personne atteinte d’un handicap visible, comme la surdité, soit atteinte d’un handicap visible si ses appareils auditifs sont cachés sous ses cheveux ou si elle n’est pas appareillée.
Quand l’invisible devient handicapant
Contrairement au handicap visible que l’on connaît tous, le handicap invisible, lui, ne se perçoit pas directement ou même pas du tout. C’est pour cela qu’il n’est souvent, par essence, pas reconnu en tant que véritable handicap.
C’est à la fois une bonne et une mauvaise chose. Quand les personnes en situation de handicap visibles ne peuvent pas le cacher, ceux qui souffrent d’un invisible peuvent parfois choisir de faire part de leur maladie ou non. Mais bien souvent, beaucoup préfèrent garder leur souffrance pour eux, ce qui peut parfois s’avérer d'autant plus lourd. Ce phénomène qui peut parfois empirer les symptômes ou conduire le malade à l'épuisement permet de rentrer dans les cases pour ne pas subir le regard des autres. Il s’explique par plusieurs raisons :
Tout d’abord par peur que leur souffrance soit incomprise, minimisée ou carrément niée. Les personnes en situation de handicap invisible font souvent face à des remarques négligentes, dont la plus connue qui explique que “c’est dans la tête”.
Vivre au quotidien avec un handicap a de lourds contre coups et se trouve être fatiguant. Les personnes malades ont donc besoin d’un rythme de sommeil plus important car leurs journées leurs sont souvent plus épuisantes qu’en moyenne. Viennent alors les jugements et stigmates : “Tu pourrais faire un effort”, “t’as qu’à dormir plus la nuit”, “tu te cherches des excuses”, “moi aussi je suis fatiguée”. Des propos souvent dit dans l’ignorance de la souffrance vécue, mais qui peuvent s'avérer blessantes.
Validisme : là où le handicap prend place, l’éloignement social se creuse
Et même si les personnes atteintes d’un handicap visible disposent le plus souvent d’une compréhension et d’une bienveillance qui ne sont pas à la portée des handicapés non visibles, les deux font face à un fléau dénigrant : le validisme. Aussi appelé capacitisme, le validisme est un système de valeurs oppressif faisant de la personne dite "valide", autrement dit sans handicap, la norme sociale.
Qu’il soit glorifiant : “Tu es courageux”, “je ne pourrais pas faire la même chose si j’étais à ta place” ; ou victimisant : “La pauvre, elle ne pourra plus jamais marcher”, le validisme est très souvent maladroit.
Il peut aussi prendre une autre forme : celle de la remise en question de la condition de la personne en situation de handicap. Cela est plus susceptible d’arriver dans le cas des handicaps invisibles. On va par exemple venir demander “Elle est vraiment handicapée ? on dirait pas comme ça”.
Et dans le pire des cas, certains valides viennent à évincer de missions professionnelles ou de moments en communauté des personnes handicapées, en pensant mieux connaître leurs capacités, en choisissant des endroits sans accès PMR ou encore en ne les conviant pas.
Ecrit par Pauline Guilcher