Burn-out : une décision historique du Conseil d’État change la donne pour les salariés
Face à une explosion des cas d’épuisement professionnel en France, le Conseil d’État a tranché : l’arrêt maladie pour burn-out est désormais pleinement légitime. Cette décision, annoncée en mai 2024, intervient alors que 34 % des salariés se disent concernés par l’épuisement professionnel, avec un impact humain et économique majeur.
La situation est particulièrement préoccupante chez les moins de 29 ans : 59% d’entre eux déclarent être concernés. Les femmes apparaissent légèrement plus exposées que les hommes, avec 46% contre 44%. Certains secteurs sont davantage touchés que d’autres, notamment la santé, l’éducation et le travail social. Les données révèlent que jusqu’à 60% des médecins spécialistes et 50% des infirmiers présentent des signes de burn-out. Le secteur bancaire affiche également des niveaux élevés, avec 30% d’employés déclarant un stress régulier et 15% des symptômes d’épuisement professionnel.
Le droit du travail reconnaît enfin le burn out
Dans ce contexte, une décision majeure est intervenue le 28 mai 2024. Le Conseil d’État a confirmé que la mention « burn-out » sur un arrêt de travail constitue un motif légitime et ne peut être assimilée à un arrêt de complaisance. Cette clarification protège les médecins prescripteurs contre d’éventuelles sanctions et confirme le droit des salariés à un arrêt pour épuisement professionnel. Elle marque un tournant dans la reconnaissance officielle de cette souffrance, longtemps minimisée ou reléguée au rang de fragilité personnelle.
Parallèlement, depuis la loi Rebsamen de 2015, le burn-out peut être reconnu comme maladie professionnelle hors tableau. Cette reconnaissance nécessite toutefois de remplir deux conditions : établir un lien direct et essentiel avec l’activité professionnelle et justifier d’un taux d’incapacité permanente partielle d’au moins 25%. Cette évaluation est effectuée par le médecin-conseil de la Caisse primaire d’assurance maladie et peut, en cas de doute, être soumise au Comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles.
Le burn-out se traduit par un épuisement émotionnel, mental et physique, accompagné de perte de motivation, de troubles de la concentration et, parfois, de symptômes somatiques comme des douleurs musculaires, des troubles du sommeil ou des migraines chroniques. Lorsque la reconnaissance en maladie professionnelle est accordée, le salarié bénéficie d’une prise en charge à cent pour cent des soins, d’indemnités journalières majorées et, en cas de séquelles, d’une indemnisation sous forme de rente ou de capital.
Une reconnaissance encore semée d’embûches
Cependant, le parcours administratif pour obtenir cette reconnaissance reste complexe. Le dossier doit être complet et précis, comprenant certificats médicaux, preuves du lien avec le travail et témoignages. Les délais d’instruction peuvent atteindre plusieurs mois, surtout en cas de saisine du Comité régional. En juillet 2025, une question parlementaire a mis en lumière l’absence d’un référentiel national pour évaluer les affections psychiques, ce qui engendre des disparités importantes selon les régions.
Les associations de prévention insistent sur le rôle central du médecin du travail pour établir le lien entre souffrance psychique et conditions de travail, mais aussi sur l’urgence de renforcer la prévention des risques psychosociaux. Malgré la désignation de la santé mentale comme grande cause nationale en 2025, elles rappellent que seule une action coordonnée entre pouvoirs publics, entreprises et acteurs de santé permettra de réduire durablement l’incidence du burn-out.
Cette reconnaissance par le Conseil d’État est donc une avancée significative, mais elle ne constitue qu’une étape. Pour que le burn-out ne continue pas de fragiliser dans le silence la vie de milliers de travailleurs, il est nécessaire d’harmoniser les critères d’évaluation, de simplifier les procédures et d’investir massivement dans la prévention.
De Laure ROUSSELET
*Source image: Banque d'images l'ibre de droits - CANVA
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